Clémence Lenoir, la passion de l’économie au service des politiques publiques
Après ses classes préparatoires commerciales, Clémence Lenoir (promotion 2010 en économie gestion) choisit l’ENS Paris-Saclay, « la voie royale pour faire une thèse », une idée qui trotte déjà dans sa tête. Elle vit sa première année au département économie et gestion de l’École comme « un choc intellectuel », au point où elle s’accorde une année de césure pour réfléchir à la suite de son parcours. Elle effectue deux stages : l’un en cabinet de conseil en stratégie, l’autre en économie du développement. « J’ai clairement préféré le second, ce qui m'a motivée pour poursuivre en Master 1 d’économie, puis de candidater pour faire le double parcours (3e et 4e année) avec l'École nationale de la statistique et de l'administration économique (ENSAE). A la fin de la troisième année, direction Marseille pour un stage recherche en économie de la santé à la Aix-Marseille School of Economics, puis retour à Paris pour faire son master recherche en analyse et politique économique de la Paris School of Economics. « Je me suis spécialisée en économie internationale, un domaine qui me permettait de combiner approches théoriques de la macroéconomie et approches empiriques. Je pouvais m’appuyer sur des données très précises qui m’ont permis de tester empiriquement les prédictions des modèles ».
De Yale à l’Élysée
La jeune normalienne s’engage dans une thèse en économie internationale, dirigée par Isabelle Méjean et Francis Kramarz, professeurs au Centre de recherche en économie et statistique (Crest) de l’ENSAE. Elle fait partie des trois normalien-n-es[1] retenu-e-s pour l’effectuer en tant qu'administratrice de l'Institut national de la statistique et des études économiques, l’Insee (une direction générale du ministère de l'Économie et des Finances). Pendant sa thèse, elle part six mois aux Etats-Unis en échange universitaire à l’Université de Yale, une expérience qui la marquera à vie. « C'était génial ! », se souvient-elle. « J’étais plongée au cœur d’un environnement international avec les meilleurs chercheurs de mon domaine ».
Après avoir soutenu sa thèse, Clémence Lenoir rejoint en 2019 la direction générale du Trésor, d’abord au sein du bureau marché du travail, puis auprès d’Agnès Bénassy-Quéré, sa cheffe économiste. « Cette administration fait du conseil en politique économique auprès des décideurs », décrit-elle. Autrement dit, le tremplin rêvé pour la propulser ensuite conseillère en charge de la macroéconomie au cabinet de Bruno Le Maire, puis conseillère macroéconomie et politiques publiques au cabinet d’Elisabeth Borne avant d’arriver à celui de la Présidence de la République, en novembre 2023. « Cela s'est fait de manière très fluide », affirme-t-elle.
L’économie proche de la décision
« Je fais de l’économie de plus en plus appliquée et proche de la décision, ce que j’ai toujours souhaité» témoigne Clémence qui n’aime rien tant que confronter les modèles économiques aux données concrètes, passer des prédictions empiriques aux résultats. « Tout cela permet d’éclairer différentes politiques publiques : emploi, logement, fiscalité ». La tendance dans la sphère publique est bien aujourd’hui de s’appuyer sur les (bons) chiffres pour prouver l’efficacité d’une politique. « En tant que conseillère au cabinet du Premier Ministre et du Président de la République, j’assume ma part de responsabilité sur le diagnostic de l’impact des politiques mises en œuvre ».
Faire dialoguer recherche et décision
Où la jeune conseillère puise-t-elle cette aisance naturelle ? « De la recherche, incontestablement. Elle crée une sorte d'horizontalité dans la discussion intellectuelle, répond Clémence qui l’avait déjà constaté lors de son séjour à Yale. « Professeurs de Princeton, du MIT, de Yale et doctorants se challengeaient d’égal à égal sans que cela choque. Dès lors que les contre-arguments était pertinents, ils avaient le droit d’être dits. L'objectif était de les examiner tous pour rendre le raisonnement le plus robuste possible ». Cet acquis est aujourd’hui « une grande force » dans le métier de Clémence Lenoir, notamment grâce à la formation de l’ENS Paris-Saclay. « On y apprend à apprendre et à comprendre. Dès que je ne comprends pas, je prends le temps de chercher. Si j'identifie une faille dans le raisonnement, je décompose rigoureusement les phénomènes et les effets de cause à conséquence ».
Que peut-on souhaiter à une normalienne qui brille dans l’ombre des cabinets des plus hautes sphères de l’État ?
« Justement, j’aimerais bien un jour « dézoomer » de la France pour aller voir ce qui se passe dans une institution internationale ».
[1] La première année de thèse correspondait à une formation complémentaire du corps de l'Insee et les deux années suivantes elle a un statut jeune chercheur au sein de l'ENSAE.
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